27 juin 2005

HOLLYWOOD ET LA GRANDE DÉPRESSION

Cinderella Man : simplifier l'histoire pour mieux la vendre

Ça fait quelques semaines qu’on peut voir sur nos écrans le film Cinderella Man : un long métrage sur l’histoire du boxeur James J. Braddock sur fond de toile de la grande dépression des années 30.
Le toujours pertinent Dave Zirin du site Internet
Edge of sports avait des commentaires sur le film que je vais maintenant partager avec vous...
Zirin compare Cinderella Man avec un autre film traitant d’un héros lors de la grande dépression — Seabiscuit — non pas juste parce que le jeu effacé de Russell Crowe rappelle l’absence d’expression du cheval…
C’est que les deux films ne font pas justice aux mouvements sociaux en ébullition durant les années trente.
On peut dire : bon, écoute, je vais voir un film pour me divertir, pour voir une belle histoire, non pas pour comprendre une réalité sociologiquement complexe…
Le problème c’est que le cinéma créer nos références communes à l’histoire ou envers d’autres sociétés.
Dans le cas de la grande dépression, il est tout à fait faux de montrer ça comme si tout le monde avalait sa pilule de misère passivement et n’attendait que l’arrivée d’un héros comme Braddock pour se lever et prendre espoir.
Des centaines de milliers de personnes luttaient quotidiennement pour s’offrir une alternative à la barbarie du capitalisme de l’époque.
Mais, selon Zirin, presque tout le monde dans Cinderella Man se promène comme des lobotomisés.
Les rôles des femmes, d'ailleurs, ne servent qu’à mettre en valeur les acteurs principaux.
Le film traite aussi de manière complètement simplette le champion poids lourd de l’époque : Max Baer.
Un film a toujours besoin d’un bon et d’un méchant, trop souvent on se débarrasse des nuances dans la personnalité de chacun afin d’offrir un produit le plus facilement digestible.
Dans le cas du méchant à abattre, Max Baer, on l’a réduit au rôle d’un gars qui était fier d’avoir tué deux boxeurs dans le ring tandis qu'en réalité, il en avait été terriblement troublé.
Baer avait même combattu un boxeur sympathique aux nazi en arborant l’étoile de David sur ses shorts.
Le plus triste dans Cinderella Man, c’est que le film fini avant même que l'on puisse voir le dernier combat du héros contre Jos Louis, en 1937.
Jos Louis était un symbole pour l’émancipation des noirs aux ÉU et pour une classe de travailleurs qui se radicalisait.
Mais pour montrer ça, écrit Zirin, y’aurait fallu complexifier l’histoire, quelque chose auquel Hollywood est complètement allergique.
Cinderella Man nous montre une industrie du cinéma qui préfère simplifier les personnages et de les transformer en bonhommes allumettes, facilement consommables et tout aussi facilement oubliables.
Et dans le cas de Braddock et de la grande dépression, ils ont réussi cette tâche avec brio.

LE CANADA ET YVON NEPTUNE

Les agences humanitaires canadiennes et l'arrestation du premier ministre d'Haïti Neptune
J’ai eu le bonheur de lire l’excellent article de Kevin Skerrett du Canada Haiti Action Network sur le rôle du Canada dans l’emprisonnement scandaleux du premier ministre haïtien sous Aristide, Yvon Neptune.
Rappelons, encore une fois, que le Canada a pleinement participé au coup d’État qui a renversé le président démocratiquement élu d’Haïti Jean-Bertrand Aristide le 29 février 2004 : un coup qui a mis une fin à dix ans d’évolution constitutionnelle dans le pays le plus pauvre de notre hémisphère.
Le gouvernement non-élu mis en place par la suite a mené une guerre civile de répression contre le réseau qui a mis Aristide au pouvoir, le mouvement Lavalas.
On note des centaines d’assassinats et d’arrestations politiques depuis le 29 février 2004 : une date qui, selon nos dirigeants, où on allait revoir la démocratie renaître en Haïti.
Un cas important pour notre compréhension du rôle canadien dans tout ça est l’arrestation d’Yvon Neptune.
Neptune s’est remis entre les mains de la police haïtienne au mois de mars 2004 suite à un mandat d’arrestation émis contre lui par le gouvernement intérimaire concernant son rôle dans un soi-disant massacre à St-Marc dont il aurait été le maître organisateur.
Au mois de février 2004, l’aile haïtienne de la coalition nationale pour les droits haïtiens, un organisme humanitaire recevant ses fonds de l’Agence canadienne de développement internationale — c’est-à-dire payé avec nos taxes canadiennes — a dévoilé son rapport indiquant que Neptune était directement responsable du massacre (pour ne pas dire «génocide») de 50 personnes pour l’unique raison que ces gens s’opposaient au gouvernement Aristide.
En fait, ce qu’on découvre en lisant l’enquête de Kevin Skerrett, c’est que c’était un rapport mensonger et complètement biaisé créé spécifiquement pour donner l’impression que les seuls à provoquer de la violence en Haïti lors des mois menant au coup d’État étaient Lavalas et Aristide.
Beaucoup de gens ont cru ces mensonges, parmi eux l’association québécoise des organismes de coopération internationale qui avait officiellement demandé au gouvernement canadien de retirer son appuis à Aristide et Lavalas le 15 décembre 2003.
Alors, Neptune se remet à la police, croyant à tort qu’il allait avoir le droit de se défendre en justice : en réalité, sa vie a été menacé à plusieurs reprise et il n’a eu le droit de voir un juge que onze mois après son arrestation.
Tout ça sous les yeux approbateurs de l’agence canadienne de développement internationale, une agence du gouvernement fédéral.
En lisant les articles de Skerrett, on peut voir qu'il n’y a pas eu de génocide, ni de massacre sous les ordres de Neptune à St-Marc, que c’était en fait une séries de conflits violents ayant résulté en une douzaine de morts entre des groupes appuyant Aristide et les criminels qui voulaient le renversé.
Neptune est maintenant illégalement en prison depuis un an et il est clair qu’on doit le relâcher immédiatement.
Le cas du premier ministre haïtien Yvon Neptune nous montre à quel point ont nous a menti au sujet d’Aristide durant les mois avant son renversement.
Qu’en réalité, notre gouvernement a préféré voir des bandes de criminelles prendre le pouvoir là-bas que de laisser en place un président qui résistait à la médecine de cheval de privatisations à tout rompre imposées par des institutions financières néo-libérales.
On doit sérieusement revoir le programme de l’agence canadienne de développement internationale afin qu’on s’assure que les organisations qui luttent pour les droits humains et la démocratie le font de bonne foi et non pas pour servir une vision étroite de politique étrangère de notre gouvernement.
Au moins avant les élections haïtiennes prévues pour octobre et novembre 2005…

BARRICK GOLD AU CHILI

La compagnie minière du Canada Barrick Gold fondra les glaciers du Chili
Des foules de manifestants ont crié leur mécontentement le 4 juin dernier contre le géant minier canadien Barrick Gold dans les rues de Santiago, au Chili.
C’était en réponse au projet gigantesque d’une mine à ciel ouvert à Pascua Lama, en bordure du Chili et de l’Argentine.
Barrick Gold est une transnationale puissante qui planifie d’extraire 500 milles kilogrammes d’or — en plus de l’argent, du mercure et du cuivre — du site de Pascua Lama au cours des 20 prochaines années...un investissement de 1,5M$.
Mais avant d’extraire tout cet or, Barrick compte déplacer trois glaciers géants des Andes.
La compagnie espère déplacer les glaciers sur d’autres surfaces comparables en les poussant à rencontrer le glacier plus gros de Guanaco.
Évidemment, ceux qui ont l’environnement et la santé des populations avoisinantes à cœur s’inquiète de l’impact sur les sources d’eau dû aux déplacements des glaciers.
La mine Pascua Lama sera décapée par du cyanure, question de séparer l’or du reste du minerai le plus rapidement possible.
Le problème avec ça c’est que le cyanure est un composé chimique qui, même en de très petites quantités, est extrêmement toxique pour les humains et les autres formes de vie.
Ailleurs dans le monde où on a utilisé ce procédé on a eu droit à des catastrophes écologiques…et pourquoi, dans le fond ?
Une rareté, l’or, qui existe en quantités suffisantes dans les banques centrales et au FMI pour subvenir à tout nos besoins pour des dizaines d’années, mais les compagnies minières, telles que Barrick, utilisent leur influence pour qu’on laisse dormir cet or-là dans des coffres-forts pendant qu’eux bombardent des glaciers et saupoudre des écosystèmes de cyanure pour garnir les poches de leurs actionnaires…
Alors en plus de fondre une bonne partie des glaciers en les déplaçant, ce qui est certain d’affecter l’équilibre écologique en aval, on va perdre une quantité phénoménale de connaissances environnementales.
Les glaciers sur les Andes ont conservé des traces de la faune et la flore reculant sur des milliers d’années.
Il y a en plus les dangers liés directement au site de construction et d’exploitation à Pascua Lama : selon quelques sources on dit qu’il y a déjà eu 15 morts liés au projet de Barrick.
Bien sûr, si on va sur le site Internet de Barrick ils diront qu’ils sont une entreprise responsable et soucieux de l’environnement et blablabla…bien sûr, c’est le rôle du département de marketing de faire avaler l’inacceptable au public.
Je préfère plutôt me fier aux Chiliens qui sont contre le projet (et qui subiront les conséquences) et les groupes écologistes qui connaissent les pratiques d’entreprises comme Barrick partout sur Terre et qui savent les dégâts qu’ils sont capable de causer…tout en gardant une belle image publique!
Barrick Gold s’attend à ce que son projet à Pascua Lama soit accepté d’ici la fin de l’année, pendant ce temps-là l’opposition à celui-ci ne cesse de grandir et c’est tant mieux!

L'OEA : ARME DIPLOMATIQUE

Nicaragua : prochaine cible de l'arme diplomatique des États-Unis
Le 35ième sommet de l’OEA, l’organisation des états américains, a eu lieu au début du mois de juin à Fort Lauderdale et on a eu droit à une belle défaite de Bush et de Condoleezza Rice qui ont tenté de transformer l’organisation en arme pour dicter la politique en Amérique latine.
Rice avait tenté de convaincre les dirigeants d’Amérique latine d’accroître les pouvoirs de l’OEA pour superviser la démocratie dans ces pays et de pouvoir intervenir si nécessaire.
La proposition, vu par tous comme un moyen de contrôler le Venezuela de Chavez, a été rejeté majoritairement.
Le Venezuela dont on accuse de fomenter les rébellions en Bolivie et de servir de locomotive à tout le virage à gauche qu’on observe en Amérique centrale et du sud...
Ça l’indique à quel point les ÉU compte utiliser l’OEA pour contrôler les affaires internes des pays de ce qu’ils considèrent encore comme leur arrière-cours.
On avait même envoyé des agents de l’OEA pour sauver le président en chute du Nicaragua, l’ami des ÉU Enrique Bolanos.
Ça rappelle la mission d’observation qu’avait déclenché l’organisation des états américains en Équateur suite à la démission du président Lucio Gutierrez en avril dernier.
Le gouvernement de l’Équateur avait d’ailleurs critiqué le fait que l’OEA ne fait nulle part mention des violations constitutionnelles commises par Gutierrez précédant sa démission.
En fait, l’Équateur avait totalement rejeté le rapport des observateurs de l’OEA , disant, en gros, de quoi ils se mêlent eux-autres.
L’OEA a tenté dernièrement de mousser la popularité du candidat favori des ÉU pour la présidence de la Bolivie, Carlos Mesa, un homme détesté par la population parce qu’il est, entre autres, ami des ÉU, du FMI et des transnationales.
Et là vu que le Nicaragua est sur le point de se joindre au virage à gauche en Amérique latine, on utilise à nouveau l’OEA pour limiter les dégâts.
Il n’y a donc plus d’appuie pour le président Bolanos au Nicaragua alors en mai de cette année l’OEA a envoyé une mission technique pour superviser la dispute entre l’assemblée nationale et le président.
Résultat : le rapport de l’OEA prenait évidemment le parti de Bolanos, même s’il a été reconnu d’avoir mal utilisé des fonds électoraux.
Au Pérou, le président Toledo a aussi été reconnu du même crime.
Mais les deux ont droit au jugement favorable de l’OEA : pourquoi ? Bien parce qu’ils sont des amis des ÉU et de fervents amateurs de l’économie néo-libérale, la seule permise par l’Oncle Sam.
Faudra garder un œil sur l’OEA, parce qu’on est en train là-bas de développer un modèle d’intervention diplomatique fait spécifiquement pour abattre la vague anti-impérialiste qui s’étend en Amérique latine. Au Nicaragua, pour empêcher l’Assemblée nationale de changer sa constitution comme bon lui semble, et en Bolivie pour empêcher la nationalisation des ressources énergétiques...

20 juin 2005

RONDES DE COMBAT

Une première ronde d'élections présidentielles en Iran sous la menace militaire américaine. Le Ghana contre le FMI pour le droit à l'autosuffisance alimentaire. La porte s'ouvre pour la privatisation de notre système de santé au Québec alors que les listes d'attentes s'allongent. Les ministres de la finance des pays du G8 parlent d'éliminer la dette des pays les plus pauvres mais instaurent un racket à la place.


Élections présidentielles en Iran : de 1000 à 7 à 2 candidats...conservateurs

La première ronde de l'élection présidentielle avait lieu vendredi et les premiers résultats indiquent que ça prendra une deuxième ronde vendredi prochain pour trouver un gagnant.
Ça sera une lutte à finir entre le maire conservateur de Téhéran - Mamhoud Ahmadinejad (19,5%) et l'ancien président qui a mené l'Iran entre les années 1991 et 1997 - qu'on dit pragmatique… Akbar Hashemi Rafsanjani (21%).
On s'attendait à ce que Rafsanjani soit de la course, mais peu avait prédit que le maire de Téhéran allait remporter autant de voix.
Mehdi Karroubi, un réformiste, a terminé troisième avec 17,3% des votes.
Celui-ci conteste les résultats en appelant pour une enquête…Il ne pourra pas participer lors de la deuxième ronde.
Y'a notre Pierre Pettigrew national qui a vertement critiqué le processus électoral iranien en disant que c'est un processus qui donne trop d'importance à un corps non élu.
C'est qu'au début il y avait 1000 candidats aux présidentielles et c'est un conseil du clergé, l'autorité suprême du pays, avec à sa tête l'Ayatollah Ali Khamenei, qui a décidé de ceux qui peuvent se présenter.
Des groupes de dissidents et d'étudiants iraniens ont appelé à un boycott des élections parce que l'Ayatollah a refusé que des femmes et des réformistes fassent partie de la course.
Pendant ce temps-là, y'a Washington qui condamne aussi le processus et qui lance des menaces à demi voilées.
Il demeure que parmi les sept candidats d'origine il y avait pas mal de différences qui les séparaient et qu'une partie considérable de la population iranienne conteste ouvertement l'autorité du clergé.
Alors vendredi prochain ça se décidera entre Rafsanjani (qui tient un discours de réconciliation avec les ÉU et de libéralisation économique, ainsi que plus de liberté d'expression; certains croient que ce discours est fait pour plaire aux jeunes Iraniens et qu'il ne tiendrait pas ses promesses s'il remporte la présidence) et Mamhoud Ahmadinejad.
Alors même s'il existe un mouvement fort pour réformer le pays et l'éloigner du règne de la théocratie, il demeure que Bush préfèrerait changer le régime avec des bombes.
Il va sans dire que Washington aurait aimé que l'Iran élise un candidat hyper conservateur, question de justifier une intervention militaire là-bas.
Le problème c'est que si les bombes américaines pleuvent sur l'Iran, c'est le pouvoir du clergé qui s'en trouvera renforcé…
C'est drôle que Bush soit aussi sévère envers l'Iran, car pendant ce temps-là il louange les régimes beaucoup plus répressifs en Arabie saoudite et en Égypte.
À voir vendredi prochain…

Ghana contre le FMI : pieds de poule version africaine

On a souvent parlé ici des problèmes que causent l'institution financière, le mal incarné, qu'est le Fonds monétaire international.
On en reparlera même pendant la deuxième heure et pour l'instant je vous transmets un exemple concret de la souffrance que le FMI impose sur un pays pauvre en Afrique, le Ghana.
C'est un pays de l'Afrique occidentale ayant une population de 15 millions.
Depuis plusieurs années, le Ghana a été littéralement inondé de poulet cheap venu des ÉU et de l'Europe.
C'est un phénomène que l'on appelle du dumping. L'industrie du poulet étant fortement subventionnée dans les pays riches, les surplus de production sont dompées dans les pays du tiers-monde à des prix de loin inférieurs à ce que le poulet coûte localement.
En conséquence, le marché domestique du poulet s'est effondré sous 40 000 tonnes de poulet cheap venu de l'Ouest.
En 1992, il y avait 400 000 éleveurs de poulet au Ghana, ils fournissaient 95% du marché local, mais en 2001 ils ont vu leur part de marché réduit à 11%.
Les producteurs étrangers paient un tarif ou une taxe de 20% sur le poulet qu'ils envoient au Ghana.
En 2003, le gouvernement ghanéen a décidé d'augmenter ce taux à 40% pour freiner un peu l'inondation qui tuait l'industrie locale…
Mais notre cher FMI a bloqué la proposition. Rappelons que le FMI est une institution qu'aucun Ghanéen n'a élue.
Le FMI clame que la hausse des tarifs nuirait au «programme ghanéen de réduction de la pauvreté»!
On voit à quel point le FMI est aveuglé par son idéologie du tout-marché pour les pauvres et les subventions pour les riches.
D'autant plus que selon les règles de l'Organisation mondiale du commerce, le Ghana aurait le droit de hausser ses tarifs sur les importations de poulet à un niveau de 90%, vu que l'industrie à l'Ouest est boostée aux stéroïdes des subventions…
Les programmes d'ajustement structurel du FMI - les conditions imposées par l'institution financière pour accorder des prêts au pays, - font en sorte qu'il est interdit au Ghana de subventionner ses propres industries alimentaires.
Conséquence : le Ghana voit son auto-suffisance alimentaire disparaître depuis les 20 dernières années.
N'étant plus capable de vendre leur stock de riz, de tomate et de poulet, des milliers de jeunes fermiers migrent vers les centres urbains dans l'espoir de se trouver un emploi inexistant.
Tout ça sans parler du fait que les poulets de l'Europe et des ÉU présentent des menaces à la santé publique.
Les surplus sont déjà de mauvaise qualité et le temps que ça prend pour arriver en Afrique les poulets ont gelé et dégelé plusieurs fois.
On estime même que 15% du stock est infecté de salmonelle.
Bref, les éleveurs de poulet ont apporté leur cause d'élever les tarifs devant la cour suprême du Ghana, parce qu'ils jugent que les actions du gouvernement, qui agit sous les ordres du FMI, sont contraires à leurs droits constitutionnels.

Privatisation de la santé au Québec : cercle vicieux

Le 9 juin dernier la Cour Suprême du Canada tranchait en faveur d'une certaine privatisation de notre système de santé.
4 juges sur 7 ont décidé que les temps d'attentes sont trop longs dans le système québécois et qu'il est temps pour ceux qui peuvent payer pour du traitement privé soient mesure de le faire.
Tout ça a commencé lorsque le dr. Jacques Chaoulli et son patient George Zeliotis sont allés en cour contre notre province sous prétexte que nos lois sur l'assurance-santé ne permettaient pas à Zeliotis de s'acheter des soins privés afin d'éviter la longue liste d'attente pour son intervention chirurgicale.
Leur cas a été refusé par la cour supérieure du Québec et une autre fois par en appel.
C'est alors que Chaoulli et Zeliotis ont approché la cour suprême du Canada : ils ont plaidé que la prohibition du Québec envers une assurance-santé privée contredisait la charte québécoise des droits et libertés.
Ça prit un an à la cour suprême à prendre sa décision. Ils ont entendu le plaidoyer d'un paquet de cliniques privées ainsi que 10 sénateurs favorables au duo, à leur tête le sénateur Michael Kirby.
Alors 4 des 7 partageaient leur avis; les 3 autres étaient fortement en désaccord avec leur position.
Le problème dans tout ça c'est la longueur des listes d'attente et le temps d'attente.
Les 4 juges ont dit que les Québécois ont le droit de se prémunir d'une assurance-santé privé afin d'obtenir des soins de santé qui sont mal couverts par notre système public.
Ce que la cour suprême dit en gros c'est qu'il faut améliorer notre système public. Que les temps d'attente sont inacceptables.
L'origine du problème vient des coupures draconiennes de la part du gouvernement fédéral au milieu des années 90.
Ces coupures fédérales ont mené à une restructuration massive et des coupures de services au niveau provincial.
Résultat : il faut attendre de plus en plus longtemps pour obtenir des soins, ce qui est en soit une menace à la santé.
Le danger est clair, pourtant : si on ouvre la porte aux soins de santé privée, une partie de plus en plus considérable de notre système se convertira en système pour les riches, réduisant encore plus la capacité du système public d'être efficace.
C'est une pente très glissante, duquelle on aura un mal fou à remonter : la population ne voudra plus payer les taxes pour le supporter et ceux qui utiliseront les soins privés vont se foutre du fait que le système public se dégrade…
Attendons-nous maintenant à ce qu'il y ait une augmentation de la pression pour un système à deux vitesses, avec le danger d'avoir un système à l'Américain hyper-coûteux et inefficace.
Entre payer ses impôts et partager collectivement les coûts d'un bon système ou payer une beurrée en assurance privée et faire faillite pour traité un cancer, il me semble que le choix est clair…

Élimination de la dette des pays pauvres : payant, en fin de compte!

Encore une fois, je vous rapporte les propos de George Monbiot, chroniqueur au journal britannique The Guardian.
Samedi dernier sept ministres de la finance des pays du G8 s'étaient rencontrés pour négocier l'élimination de la dette des pays les plus pauvre du monde contractée chez la BM et le FMI.
Il est très important de rappeler encore et toujours que la majorité de l'argent prêté par la BM et le FMI l'a été envers des régimes de dictateurs corrompus.
Et qu'on aurait jamais dû subir les populations aux conditions extrêmes afin de rembourser ses montants-là.
En 2005, c'est absolument obscène de demander à des pays pauvres de payer plus en remboursement de dette qu'en santé et en éducation.
Alors on parle d'éliminer la dette, mais il y a bien sûr des conditions, et comme on pouvait bien s'y attendre, elles sont tout aussi obscènes :
Pour avoir à l'élimination de la dette, les ministres des finances du G8 demandent que les pays s'attaquent à la corruption, qu'ils accélèrent le développement du secteur privé et qu'ils éliminent les embûches à l'investissement privée domestique et étranger.
Il n'y a rien de mal à vouloir combattre la corruption, sauf qu'on se demande d'où ça sort puisque la BM et le FMI ne se sont jamais gênés de prêter de l'argent à des dirigeants corrompus :
Mobutu au Zaïre, Suharto en Indonésie, Marcos aux Philippines, etc. La liste est longue !
Les dirigeants du G8 font semblant de vouloir s'en prendre à la corruption; en fait 25 pays ont ratifié un traité de l'ONU contre la corruption, mais aucun de ceux-là sont des pays du G8.
Pourquoi ? Simplement parce que les entreprises transnationales issues du G8 dépendent du fait que les dirigeants de la planète sont achetables pour accroître leurs profits.
Le problème avec les conditions pour éliminer la dette ou pour accorder des prêts supplémentaires ce n'est pas le fait de simuler vouloir combattre la corruption, c'est que ces conditions deviennent une arme pour transgresser la souveraineté d'un pays.
C'est-à-dire forcer la commercialisation à outrance, privatiser les ressources de l'État, la libéralisation des échanges et du flot des capitaux.
Les gouvernements du G8 affirment vouloir aider les pays pauvres à se développer, mais selon Monbiot, ils ont tout intérêt à ce que leur développement soit un échec afin que nos compagnies puissent s'approprier leurs services publics et acheter leurs commodités à des prix plancher.
Oui, on devrait annuler les dettes contractées illégitimement, mais sans conditions et le plus tôt possible.
Petits conseils de lecture : «L'argent du monde» de Jean-Jacques Pelletier et «Confessions of an economic hitman» de John Perkins.