La pari remporté du Premier ministre Koizumi
On risque d’entendre beaucoup parler du manifeste pour un Québec lucide avec la réponse des progressistes québécois qui ne tarderont pas de mettre les pendules à l’heure…
En fait ils auraient dû appeler ça pour un Québec translucide, qui laisse passer une lumière sans dévoiler les formes, qui aveugle en quelques sorte sans que l’on puisse discerner les véritables motifs…
Pour mieux comprendre l’offensive mondialisée de l’infime minorité de riches et de puissants contre les masses de pauvres, c’est toujours pertinent de voir ses manifestations dans d’autres pays.
Prenez cet article de Gavan McCormack, professeur à l’université de l’Australie…
Au Japon, où on a tenu des élections le 11 septembre dernier, les électeurs sont tombés sous le charme de Junichiro Koizumi, le premier ministre charismatique qui a remporté le pouvoir en incarnant l’image d’un réformateur progressiste, mais qui dans les faits est tout sauf ça.
Quatre ans après son premier mandat, il s’est assuré une majorité encore plus forte au début du mois de septembre dernier et a réussi à museler tous ceux qui osent s’opposer à lui et surtout à ses projets néo-libéraux.
C’était qualifiée d’une élection référendaire où les japonais étaient appelés à dire Oui ou Non au mandat de Koizumi pour réformer la poste.
La poste est un élément fondateur du haut niveau de vie que les Japonais ont connu depuis les années 70.
Pourquoi la poste? Bien parce que c’est une institution unique qui s’occupe non seulement de 25 000 bureaux de poste et du système national de livraison, mais c’est surtout un système d’économie et d’assurance.
C’est le fonds de pension le plus imposant de la planète, ayant 3 trillions de dollars à son actif. C’est la première institution financière mondiale que Koizumi souhaite privatiser, et donc d’éloigner sa gestion des mains du peuple japonais.
Dans les coins reculés du Japon, la poste est l’institution sociale centrale.
Plusieurs préfèrent y déposer leurs économies plutôt que dans les banques parce que c’est sécuritaire, et surtout grâce au sentiment généralisé que la poste utilise ses fonds pour les projets nationaux de développement.
Alors au mois d’août son parti, le LDP, le parti Libéral-Démocrate au pouvoir depuis 55 ans — plus longtemps que le parti communiste en Chine! — a refusé d’adopter la réforme de la Poste de Koizumi, qui veut privatiser le tout en quatre compagnies. Du coup le Premier ministre a dissout la Chambre des députés et on a tenu des élections.
Pourtant, personne ne s’est plaint que les services de la poste étaient insatisfaisants et Koizumi n’a pas dit grand chose pour justifier sa réforme autrement qu’en réaffirmant que le privé pouvait faire un meilleur boulot.
Pourtant, Koizumi a même dit que sa réforme de privatisation de la poste était la voie naturelle à suivre, pour ne pas dire lucide, n’est-ce pas?
Alors il a ostracisé les membres de son propre parti qui s’opposaient à son projet d’illuminé et maintenant vient de remporter une élection menée plutôt sur son image que sur le fonds de sa pensée.
Si vous avez vu une photo de Koizumi vous comprendrez l’excentricité qu’il représente dans une société si conservatrice : les cheveux longs, la chemise ouverte, des discours passionnés ponctués de phrases courtes qui s’insèrent parfaitement dans les médias électroniques.
Le chef du parti démocratique japonais, Katsuya Okada était tout le contraire : veston-cravate, des discours plates et sérieux…il représentait le vieux Japon tandis que Koizumi était perçu comme cool et nouveau.
Pourtant, c’est Koizumi qui veut revenir en arrière avec sa réforme de la poste et ainsi, ramener le Japon à une époque où le capital menait librement le pays sans supervision démocratique.
Il a donc gagné son pari et mènera maintenant sa réforme…qu’est-ce que ça signifie pour les japonais? On en parle après la musique.
Alors dans le contexte actuel du Québec lucide ou translucide selon comment on analyse le sermon de Bouchard et ses apôtres…
Bref, dans ce contexte-là nous parlions des élections récentes au Japon où le premier ministre charismatique mais démagogique Junichiro Koizumi a remporté son pari de privatiser la poste japonaise, l’institution financière la plus importante de la planète.
Il a basé sa campagne de réforme de la poste en disant que c’était la chose rationnelle, voire naturelle pour l’avenir du Japon.
Il faut comprendre que le bureau de poste du Japon a été l’élément central du développement de l’État bureaucratique japonais.
Il a remplit ce rôle en assurant un flot d’investissement vers des projets de développement de toutes sortes.
Le rôle de la poste était en fait celui de moteur principal dans un système économique qui s’approchait du keynésianisme.
Le système avait été mis en place sous le règne du premier ministre Tanaka pendant les années 70.
C’était mis en place pendant une période de répartition des richesses, d’emploi à vie, de systèmes de santé et d’éducation et où la majorité des Japonais se considérait comme membres de la classe moyenne.
Mais vu que le système était basé sur les exigences de la croissance perpétuelle et puisqu’il était continuellement manipulé pour servir les intérêts privés et public…il était intrinsèquement corrompu.
Et au cours des années 1990 la croissance a ralenti, la dette nationale s’est drastiquement gonflé et les scandales financiers se sont proliférés.
C’est dans ce contexte que Koizumi a pris le pouvoir en 2001 en incarnant le changement…
Pourtant il était intimement lié aux groupes d’intérêts qui tenaient à défaire le filet social japonais, à privatiser les entreprises et aujourd’hui à défaire et à privatiser le plus grand fonds de pension du monde.
Alors pendant le règne de Koizumi, depuis 2001, l’économie japonaise s’est réduite, la dette nationale a grossi encore plus et le salaire moyen des travailleurs a chuté.
La restructuration éclairée qu’il a menée a fait perdre beaucoup d’emplois, baisser les salaires tout en réduisant le filet social.
Alors on voit qu’il faut faire très attention aux leaders charismatiques qui nous disent incarner la lucidité.
Faut garder un œil sur les pressions externes qui poussent nos dirigeants à nous vendre des réformes qui vont contre nos intérêts :
Dans le cas du Japon, la privatisation de la poste est très bas sur la liste des priorités, mais à première place sur la liste de Koizumi.
Pourquoi? Parce que ça fait des décennies que les États-Unis insistent là-dessus.
Depuis 1985, Washington accuse officiellement le Japon d’avoir un avantage injuste à cause des liens profonds entre son système économique et social.
La poste japonaise a été ciblée comme étant une embûche majeure aux échanges commerciaux qui devait donc être démantelé.
Pas pour rien que Koizumi est si populaire à la Maison blanche…il remplit à merveille sa mission de transformer le Japon selon les exigences de l’Oncle Sam.
Les institutions d’investissement américaines et européennes salivent à l’idée de la privatisation du plus grand fond de pension du monde.
Alors les élections de Koizumi ont été son coup de grâce : il en ressort avec une majorité au parlement japonais pas vu depuis des décennies.
Il a réussi à dépeindre les opposants à la privatisation de la poste comme étant des représentants des intérêts de groupuscules corrompus, comme étant des traîtres à la Nation.
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